Hertog Jan at Botanic
Interview
Gert De Mangeleer: “De la nécessité de se remettre toujours en question…”
On connait Gert De Mangeleer comme un chef aussi inspiré que créatif, qui poursuit son cheminement personnel sans jamais se laisser détourner de la voie qu’il s’est tracé. Avec son compagnon de route Joachim Boudens, il a réussi en moins de sept ans à atteindre les sommets de la gastronomie mondiale, avec une première étoile au Michelin en 2006, la seconde en 2009 et enfin, la troisième en 2011.
Des maîtres?
Gert: “Je n’ai en fait aucun maître véritable, j’ai toujours suivi mes propres idées et balisé ma propre route. J’ai néanmoins le plus grand respect pour des personnalités comme Jonnie Boer et Michel Bras..”
L’inspiration?
“Je la trouve dans la nature, dans le produit, dans les légumes, les fleurs et les herbes que nous cultivons nous-mêmes. A un moment donné, je décide de travailler sur une nouvelle préparation. Parfois, les choses coulent de source. Quelques instants de réflexion et deux ou trois jours plus tard, la recette est sur papier. Mais parfois, les choses ne se passent pas aussi facilement, même au bout de deux ou trois semaines. C’est alors que, dans une deuxième phase, je me mets à cuisiner ou, plus exactement, j’essaye les nouveaux accords sur lesquels j’ai décidé de me concentrer. Parfois, cela fonctionne, parfois non… Si tout va bien j’essaye de parfaire la préparation. A nouveau sur le papier. Enfin, dans une troisième et dernière phase, je tente de définir les proportions exactes. Quand celles-ci sont établies, la préparation est au point...”
Un style propre?
“La simplicité, dans le respect des saveurs naturelles. ”
Les Maîtres Cuisiniers, millésime 2013
« Je suis un artisan, un entrepreneur et un enseignant par rapport à mon équipe. Celle-ci est relativement jeune et le rire et la dérision ne sont pas absents de nos rapports de travail mais jamais pendant le service. A partir du moment où le premier bon rentre en cuisine, jusqu’au moment où l’on envoie la dernière commande, chacun à le devoir de se concentrer au maximum sur sa tâche. En cas de problème, quand un chef commence à écumer pendant cinq minutes, il perd son service de vue. Il est nettement plus constructif de garder son calme et d’essayer de comprendre comment éviter que la faute ne se reproduise.
Le “secret” de la réussite?
“Toujours se remettre en question et travailler dur, avec le sens de l’économie et dans le respect des normes d’hygiène les plus strictes. Je veux mettre la barre toujours plus haut et ceci constitue un défi fantastique. Personne ne remarque les petites erreurs, mais le fait que, moi, je les constate, me suffit… Je ne veux pas qu’il y ait de fautes. Je sais que ce perfectionnisme est le point fort de l’Hertog Jan. C’est grâce à cette détermination que nous sommes arrivés où nous sommes!”
Le produit
“Je suis fou des produits que je cultive moi-même. Chaque jour j’aspire à en apprendre un peu plus sur la manière de travailler les légumes, afin d’en tirer le meilleur. Grâce à nos propres cultures, je dispose deux fois par jour de produits absolument frais. «
Les techniques de base
“La combinaison de la tradition et du modernisme constitue pour moi le défi suprême, pour autant que la saveur de base des produits soit préservée…”
Evolution?
“Comme je vois les choses pour l’instant, la gastronomie de haut vol va encore plus creuser ses racines et en sortir de nouvelles recette créatives. La tendance est à une cuisine de plus en plus saine, raffinée, savoureuse et légère.”
Le point qui fait mal?
“Les charges salariales. Celles-ci doivent diminuer ou être réparties de manière différente. Il faudrait réfléchir au fait que nous devons combiner des heures productives et non productives. Il n’y a pas de solution à ce problème pour le moment.”
Le défi à relever?
“Je suis un perfectionniste et un accro du contrôle. Tenter tous les jours de faire mieux que la veille constitue un défi, une forme de sport et une motivation permanente à laquelle je ne peux pas résister.