Lionel Rigolet

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Lionel Rigolet

Comme Chez Soi
Place Rouppe 23
1000 Bruxelles
T: +32 (0) 2 5122921
F: +32 (0)2 5118052
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Interview

« Etant la quatrième génération du restaurant, j’ai toujours voulu travailler dans le respect de la tradition, en gardant les plats mythiques et faisant découvrir, au gré des menus, de nouvelles créations suivant les saisons » indique Lionel dans l’édito de son livre « La Saint-Jacques chez soi » paru en novembre 2012.
Il est difficile, en effet, de ne pas parler du Comme chez Soi et des trois générations de grands cuisiniers qui y ont précédé Lionel Rigolet lorsque l’on brosse le portrait de ce dernier. D’ailleurs, jamais le chef de l’emblématique maison de bouche bruxelloise n’accorde d’interview sans évoquer et prendre pour référence son beau-père, Pierre Wynants.
Ainsi, son empathie pour hier animant son talent d’aujourd’hui et cimentant sa passion de demain, Lionel Rigolet est devenu un chef en pleine possession de ses moyens et de sa personnalité. Un Maître Cuisinier à son tour emblématique de notre cuisine belgo-belge néanmoins parfaitement actualisée. En somme, un chef brillant et toujours truffé d’une humilité inaltérable !

Quels sont les moments les plus importants de votre carrière ?
Le moment le plus fort pour moi a été l’année 2007 où j’ai été nommé Chef de l’Année au Gault&Millau. Ce titre m’a donné la possibilité d’affirmer ma propre cuisine mais aussi de relever un nouveau défi car c’est également l’année où nous avons perdu la 3e étoile au Michelin. Curieuse coïncidence, n’est-ce pas ?

Bien avant cela, comment êtes-vous devenu cuisinier ?
J’ai été sensibilisé à la bonne cuisine par mon oncle qui tenait une crèmerie-traiteur appartenant auparavant à ma grand-mère. Adolescent, j’allais y travailler un mois en été et pendant les fêtes de fin d’année. Ensuite, c’est avec ma mère que j’ai fait le choix d’une école hôtelière. Je voulais absolument aller à l’Ecole Hôtelière de Namur où je suis entré après avoir réussi l’examen d’entrée. Je me souviens que dans mon esprit et déjà à l’époque j’était déterminé et … c’était l’Ecole de Namur ou rien !
C’est aussi à Namur que j’ai rencontré Laurence qui n’était autre que la fille de Pierre Wynants et qui plus tard, comme vous le savez, allait devenir mon épouse.

Quelles sont les clients les plus impressionnants que vous ayez servi au Comme chez Soi ?
De très nombreuses personnalités nationales et internationales sont venues s’attabler chez nous. Mais mon plus grand souvenir est le jour où j’ai cuisiné pour nos souverains qui étaient venus accompagnés du couple royal espagnol.  C’était impressionnant et très valorisant à la fois car eux-mêmes étaient admiratifs de mon travail et m’en ont généreusement  félicité.
Une autre fois, j’ai aussi été très flatté et impressionné lorsque Lewis Hamilton, le pilote de Formule 1 que j’admire beaucoup, a demandé s’il pouvait avoir une photo avec le chef ! C’était presque le monde à l’envers ! J’aime aussi beaucoup recevoir Eddy Merckx ou Jacky Ickx qui sont devenus des proches et que j’estime beaucoup aussi.

Comme beaucoup, avez-vous les défauts de vos qualités ?
Bien sûr. Je suis très exigeant et je veux tout voir. En tant que second de mon beau-père, j’ai dû durant de longues années être plus vigilant que tout autre. Aucune faille n’était permise car plus qu’un autre on m’attendait systématiquement au tournant. J’ai toujours gardé cet aspect de l’exigence du métier et aujourd’hui encore je vois tout ce qui se passe en cuisine comme en salle ! Ceci dit pour celle-ci mon épouse veille parfaitement au grain et en tant que parfaite maîtresse de maison accorde le même respect à toute personne entrant ou téléphonant au Comme chez Soi. Toute notre équipe s’aligne sur ces principes fondamentaux et indiscutables pour une enseigne telle que la nôtre.

Qu’en est-il de votre entrée et de votre vision de l’Association des Maîtres Cuisiniers ?
J’y suis entré il y a quelques années alors que je venais de recevoir le titre de Chef de l’Année 2007 et que mon beau-père y était déjà depuis le début. Nous avions organisé un repas pour les Maîtres Cuisiniers dans la cuisine du Comme chez Soi et plusieurs d’entre eux m’ont dit qu’ils m’y verraient bien. C’était logique en quelque sorte et j’y suis resté malgré certains éléments qui, les dernières années, ne me convenaient pas toujours. Aujourd’hui avec l’arrivée de Frank Fol à la présidence j’ai beaucoup d’espoir que l’association évolue dans le bon sens car il a montré qu’il était capable de faire bouger les choses.

Actuellement, l’objectif « étoile » est-il toujours un leitmotiv pour un restaurant gastronomique ?
Cela l’est et le reste avant tout pour le chef en lui-même. A notre niveau, on travaille pour avoir une étoile même si le contexte économique actuel pose problème aux responsables d’entreprises ne pouvant plus rentrer de notes provenant de restaurant étoilé. C’est très dommageable pour notre secteur et cela influence certains chefs pour qu’ils trouvent des alternatives permettant de conserver leur clientèle.

Avez-vous un maître à « penser/cuisinier », un chef que vous admirez ?
Il est primordial pour moi de ne jamais copier quelqu’un d’autre, d’avoir sa propre cuisine, sa personnalité. Mais si je dois donner le nom de celui que j’admire le plus dans le métier, c’est en premier Pierre Wynants. Ceci pour sa rigueur, son dévouement total au métier et je dois dire qu’il me considère davantage comme son fils que comme son gendre ou son ancien second ; ce qui me fait grand plaisir !
En second lieu, j’apprécie aussi beaucoup Monsieur Frédy Girardet de Crissier en Suisse. Il pouvait sortir des choses extraordinaires en réfléchissant au moment même. Ce n’est pas pour rien qu’il a été élu Meilleur chef du siècle ! Comme Paul Bocuse et Joël Robuchon  que j’admire également pour sa précision, sa minutie et chez lequel j’ai été travaillé après mes études. J’étais aux légumes et sauces mais comme je ne me suis pas bien entendu avec les responsables de sa brigade je n’y suis resté qu’un mois et non six comme prévu !

Rencontrez-vous vous aussi des difficultés dans la gestion du personnel ?
Il est effectivement coûteux et compliqué de gérer le personnel d’un grand restaurant. Les charges sont très lourdes et nous ne sommes guère aidés par l’état alors que notre secteur est le troisième sur plan du pouvoir économique en Belgique. Ici nous employons 26 personnes qu’il faut nourrir midi et soir, par exemple, ce qui représente un budget important comme dans le privé où le coût de la vie est toujours plus lourd.

Où situez-vous l’avenir de notre assiette ?
Nous irons vers un retour aux produits, à la qualité. L’espuma sera un accessoire et dans vingt ans si je me souviendrai toujours de la sole meunière, j’aurai oublié le goût de l’espuma. Il nous faudra davantage porter attention aux petits producteurs qui ne savent pas toujours suivre car en ville, il n’y a pas vraiment de possibilité de cultiver des produits sains.

Quel est le plat mémoire de votre enfance ?
Ma maman a toujours cuisiné et préparé du potage aux légumes frais, au moins tous les deux jours. Mais c’est son vol au vent et ses boulettes sauce tomate qui me laissent le meilleur souvenir.

Que ne mangerez-vous  jamais et qu’aimez-vous par-dessus tout ?
Je ne suis pas attiré par les insectes même si j’ai goûté du scorpion en Chine, je ne trouve pas cela terrible du tout ! Par contre, un bon paquet de frites, une sole meunière ou une bonne pièce de viande m’enchantent réellement. En fait, j’aime les choses simples, pas compliquées.

Des projets en perspective ?
Pour le moment nous pensons à ouvrir une enseigne toute simple à New-York en partenariat avec des gens y étant déjà mais cela est à l’état de la réflexion, nous verrons donc. Nous réfléchissons aussi à un projet de restaurant aux Seychelles avec une cuisine à basse température et sous vide ce qui n’y existe pas encore. Mais cela aussi, il faut nous laisser un peu de temps avant d’en parler plus en détail.  Mais ne vous inquiétez pas car dès qu’il y aura du neuf je ne manquerai pas de vous informer !

interview de Joëlle Rochette